Kuan Jou CHOU
Danseuse

Kuan Jou a reçu une bourse pour participer à la manifestation Camping organisée par le Centre National de la Danse.

Quel est votre parcours artistique ?
Je suis née à Taïwan et j'ai commencé ma formation avec la compagnie de danse folklorique chinoise à l'âge de 5 ans. J'ai intégré le système de formation en danse de Taïwan au lycée, où j'ai commencé à développer le ballet, la danse moderne et l'improvisation. Pendant la période allant du lycée à l'université, une formation rigoureuse et solide a ouvert mon corps à des possibilités illimitées. Pendant mon passage à l'université, j'ai été inspirée par Marina Abramović, qui a lancé mon processus d'utilisation du corps comme un pont de connexion entre le concept et l'esprit. J'ai commencé à m'interroger sur la signification du "mouvement de danse", ce qui m'a amené à chercher des réponses dans les arts du comportement et dans le théâtre. C'est à ce moment-là que j'ai commencé mon parcours de création. Après avoir obtenu mon diplôme, j'ai rejoint la compagnie Dance Forum Taipei, où, en tant que danseuse professionnelle, j'ai découvert avec joie la technique du ‘release’ et de l’improvisation par le contact. À travers ces disciplines, j'ai commencé à étudier la relation entre les gens et la structure de leur pouvoir et celui de la société. Ma création se base sur les éléments conceptuels et comportementaux, et ces dernières années, je me suis concentrée sur les questions de genre et la recherche sur le traitement du toucher. Actuellement, je travaille en tant que free-lance.   

Quel regard portez-vous sur votre profession aujourd'hui ?
À Taiwan, il est très difficile pour les artistes de théâtre de survivre. Que ce soit par manque de public, de soutien gouvernemental ou de vision. Même si un artiste fait partie d'une troupe de danse professionnelle, la majorité d'entre eux doivent travailler à temps partiel ou enseigner en même temps pour joindre les deux bouts. A Taïwan, il faut travailler extrêmement dur et persévérer pour continuer dans les arts du spectacle. De nombreux artistes choisissent donc d'aller à l'étranger une fois leur diplôme obtenu, mais pour moi, rester dans ma ville natale et essayer d'aider à améliorer l'environnement est extrêmement important. J'ai le sentiment qu'en tant qu'artistes professionnels des arts du spectacle, notre travail est lié à l'esprit. Le travail et la vie quotidienne sont inséparables, car nous devons avoir un degré élevé d'autodiscipline et de conscience de soi dans la vie. En même temps, il est vital de ne refuser aucune possibilité, de vivre et d'accepter le présent, et aussi d'apprendre à rejeter l'abnégation et à rester humble dans le monde. Avec les progrès de la technologie et l'arrivée d'une nouvelle génération, tout change de plus en plus vite, et l'accent est toujours mis sur ce qui est nouveau, rapide et meilleur. La manière de respecter son propre rythme est quelque chose de crucial pour cette génération. Pendant la création, je me rappelle constamment qu'il faut exister ‘en tant qu'humain’, car c'est quelque chose que je trouve extrêmement important.   

Comment vous voyez-vous dans 5 ans ? Dans 10 ans ?
Je n'ai aucune idée d'où je serai dans 5 à 10 ans. Je me concentre sur ma situation actuelle et je continue d’aller de l'avant. Pour moi, c'est la chose la plus importante à avoir.

 

Interview réalisée en 2019
Photographie : Amandine Besacier